Le droit de retrait, aspects comportementaux.

par Philippe Dylewski

Le droit de retrait est malheureusement un exemple presque parfait de ce qu’est la soumission à l’autorité. Si on place dix salariés dans une salle de réunion et qu’on leur demande « que feriez-vous si votre chef vous demande de… (N’importe quel comportement inacceptable en termes de sécurité), que feriez-vous ? »

Vous pouvez faire le test. Le chiffre sera exemplaire : vous aurez 100% de refus de coopérer. Bien sûr, vous l’avez compris, la situation dans une salle de formation et dans une entreprise avec un vrai chef, n’a rien à voir. 

Allez faire un tour dans la cuisine d’un restaurant, un endroit où le danger est partout, et observez le chef donner un ordre absurde à un commis de cuisine. Combien de commis auront la force de faire appel au droit de retrait s’ils n’ont pas reçu un entrainement adéquat ? 

Si vous voulez vraiment savoir si les équipes sont à un niveau de maturité élevé concernant le droit de retrait, proposez à des chefs d’équipe de demander à des opérateurs de produire un comportement dangereux pour la sécurité. Il faut bien entendu que ce soit plausible. Pour chaque acceptation de produire le comportement dangereux, le chef devra poser deux questions, et c’est tout !

  • « Pourquoi as-tu accepté ce que je t’ai demandé de faire ? »
  • « Que comptes-tu faire la prochaine fois que cela se produit ? »

Vous pouvez penser que si vous entrainez les équipes à désobéir aux ordres mettant la sécurité en danger, les salariés vont passer leur temps à se rebeller. Non, ce n’est pas ce qui va se produire. Vous constaterez que quand on commence à traiter les gens comme des adultes, ils commencent à se comporter comme tels.

Il existe quand même des entreprises où le droit de retrait est utilisé pour faire passer le message que quelque chose ne va pas. Pour certains, c’est l’unique moyen de se faire entendre. On est bien là dans un usage abusif, c’est clair, mais j’ai vu beaucoup d’endroits où les salariés avaient abandonné l’idée de parler de ce qui ne va pas, à force de ne pas être entendu. L’utilisation du droit de retrait devient alors le dernier moyen de communiquer, et c’est un très mauvais signal. 

Croire qu’une formation d’une heure sur les aspects légaux du droit de retrait va faire avancer les choses n’a pas beaucoup de sens. L’idée que le droit de retrait est quelque chose que l’entreprise VEUT est un signe de bonne santé de l’organisation. Faire la promotion du droit de retrait, c’est montrer aux salariés qu’on peut leur faire confiance. Cela implique que le droit de retrait, lorsqu’exercé, doit être bien reçu. Pas stigmatisé. Il doit être valorisé, remercié. 

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